
ET SI ON MESURAIT LE BONHEUR ?
À Lyon, Eurêka Confluence élabore la formule de la potion magique : un indicateur pour mesurer le bien-être… et le faire grandir !
En 2015, onze initiatives ont été sélectionnées pour faire émerger des sites pilotes. Parmi ces DIVD (Démonstrateur Industriel pour la Ville Durable), deux ont été attribués à des consortiums dans lesquels Bouygues est présent : Descartes 21 et Eurêka Confluence (EC). EC est un consortium d’industriels et de nombreux partenaires fédérés aux côtés de l’aménageur (SPL Confluence) pour produire la ville autrement, dans une démarche d’innovation ouverte.
Trois axes sont développés :
- la ville efficiente & résiliente,
- la ville expérientielle
- la ville saine (axe piloté par Linkcity).
Eurêka Confluence se distingue des autres DIVD par la thématique santé à laquelle nous contribuons sur le projet “indicateur de santé – bien-être”.
Rencontrons Clémence Chastan et Antoine Kuhn, chefs de projet innovation, respectivement chez Linkcity et chez Bouygues Energies & Services.
Nous avions démarré le projet sur la mesure de la qualité de l’air… mais tout le monde le fait déjà. En nous focalisant sur la qualité de l’air, nous ne pouvions élaborer qu’un indicateur anxiogène et réducteur, un empêcheur de faire, et pas un indicateur capable de susciter des opportunités d’actions positives - Antoine Kuhn.
L’enjeu est donc de déterminer un indicateur permettant “d’agir positivement, de stimuler le quartier, de susciter des actions susceptibles de développer le bien-être et la santé des habitants”. Un indicateur qui fasse mieux qu’évaluer : qui incite ! Un indicateur qui booste les énergies. Encore faut-il qu’un tel indicateur soit reconnu et partagé par toutes les parties prenantes : habitants, entreprises, collectivités. Avant d’agir, il s’agit donc d’analyser ensemble.
Que permet cet indicateur ?
- Agir en temps réel sur le quartier, en réalisant des actions sanitaires en incitant les riverains à des actions concrètes et simples,
- Mesurer l’impact des évolutions du quartier sur la santé et le bien-être des usagers (habitants, entreprises, salariés).
- Comprendre l’impact des leviers d’action sur les critères.

Agir pour la santé et le bien-être des habitants, c’est avant tout adopter une posture pragmatique, avec le sens du résultat. Pour Clémence Chastan :
Mesurer la santé et le bien-être, c’est à la fois tenir compte de données physiques et de données de perception. Il faut inévitablement agréger une diversité de dimensions.
Il s’agira d’agréger dans un modèle informatique, des mesures de qualité de l’air réalisées grâce à des micro-capteurs et d’autres paramètres impactant le bien-être (bruyance, luminosité, météo…), grâce au ressenti des habitants en prenant en compte leurs perceptions, et enfin grâce à des données sanitaires.
Agir pour le bien-être
Des actions montantes et descendantes
Cet indicateur va permettre de fluidifier la communication entre les différents niveaux : il agira comme “un relais montant et descendant vers les acteurs du territoire, les habitants mais aussi les entrepreneurs et les acteurs du quartier”.
- Actions montantes : elles ont pour but, selon Antoine Kuhn, “d’apporter à la ville des données pour définir ce que sont la santé et le bien-être tel que perçus par les habitants”.
- Actions descendantes : selon Clémence Chastan, il s’agit de “proposer des actions concrètes, par exemple via l’Espace de santé et de prévention innovant”. Dans le cadre de cet Espace, l’indicateur sera utilisé par tout un ensemble de projets, qui répondent à l’objectif “Et si la ville devenait bonne pour la santé ?”. Cet Espace de santé innovant est bien plus qu’un lieu d’exercice de la médecine avec différents professionnels de santé, c’est avant tout “un tiers-lieu qui propose une offre de prévention complète, une palette de services, de projets au cœur du projet”. L’indicateur Santé et Bien-être sera un outil d’aide à la décision pour cet Espace de santé, un outil de prévention et de pilotage des actions.
Un animateur, un professionnel de santé ancré dans un quartier, doivent pourvoir orienter leur action, et en mesurer la performance. Pour nos deux experts, la question centrale est bien le pilotage de la santé et du bien-être dans la ville, à la fois à long terme et en continu.
Mesurer l'impact des évolutions du quartier
Grâce à cet indicateur, on pourra mesurer l’impact des évolutions du quartier sur plusieurs années. Pour Bouygues Construction, cet indicateur sera un outil précieux de dialogue et de personnalisation de l’offre d’aménagement, essentiel pour les projets de quartier.
Construire l'indicateur
Par quelle procédure se propose-t-on de construire cet indicateur ? Il faut définir une méthode et des outils de collecte de données offrant aux pouvoirs publics une capacité d’action en temps réel. Le pragmatisme avant tout : on choisit des critères pour lesquels des leviers d’actions sont possibles !
Pour cela, nous avons fait appel à une spécialiste du bien-être : Lise Bourdeau-Lepage, professeur de géographie à l’université Lyon 3, chercheur au Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) au laboratoire EVS et docteur en économie. Cette chercheuse a justement mis au point une méthode d’aide à la conception et à la promotion de projet urbain amène, destinée aux acteurs publics et privés, qui place l’usager et son bien-être au cœur de l’action publique.
Son outil ludique, nommé Tell_me, permet d’accompagner les citoyens dans la définition de leurs critères de bien-être et dans le recueil de leurs perceptions individuelles. Le protocole méthodologique qu’elle propose permet de calculer un indicateur de bien-être sur n’importe quel territoire (quartier, commune, EPCI, etc.) pour une ou des populations choisies (actifs, inactifs, seniors, célibataires, couples avec enfants, etc.). L’intérêt de sa démarche est qu’elle est reproductible dans le temps et dans l’espace. Elle garantit la comparabilité de résultats obtenus sur des quartiers différents.
Elle nous propose donc d’adopter Tell_me et sa méthode en suivant 5 étapes :
- Utiliser le panel de critères normatifs du bien-être qu’elle a identifiés : qualité de l’air, % d’espaces verts, accès aux services, etc.
- Sélectionner, parmi ces critères, ceux qui sont indispensables pour notre projet, notamment ceux qui permettent des actions opérationnelles.
- Élaborer la base de données nécessaire au calcul de l’indicateur de bien-être du quartier de Confluence.
- Collecter les préférences des citadins.
- Calculer l’indicateur de bien-être.
Il ne restera plus qu’à déployer les capteurs, collecter les données et diffuser les résultats. Sans oublier de parfaire la pédagogie associée.
Nous nous appuierons également sur le collectif Le Ministère du Bonheur, qui se définit comme “consultant en bonheur et bien-être pour les collectivités et les entreprises”. Il nous permettra de mener des ateliers avec les habitants du quartier.